Poésie
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Bétise de la guerre
Ouvrière sans yeux, Pénélope imbécile, Berceuse du chaos où le néant oscille, Guerre, ô guerre occupée au choc des escadrons, Toute pleine du bruit furieux des clairons, Ô buveuse de sang, qui, farouche, flétrie, Hideuse, entraîne l’homme en cette ivrognerie, Nuée où le destin se déforme, où Dieu fuit, Où flotte une clarté plus noire que la nuit, Folle immense, de vent et de foudres armée, A quoi sers-tu, géante, à quoi sers-tu, fumée, Si tes écroulements reconstruisent le mal, Si pour le bestial tu chasses l’animal, Si tu ne sais, dans l’ombre où ton hasard se vautre, Défaire un empereur que pour en faire un autre ?
Et un sourire
La nuit n’est jamais complète Il y a toujours puisque je le dis Puisque je l’affirme Au bout du chagrin une fenêtre ouverte Une fenêtre éclairée Il y a toujours un rêve qui veille Désir à combler faim à satisfaire Un cœur généreux Une main tendue une main ouverte Des yeux attentifs Une vie la vie à se partager.
L'albatros
Souvent, pour s’amuser, les hommes d’équipage Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers, Qui suivent, indolents compagnons de voyage, Le navire glissant sur les gouffres amers. À peine les ont-ils déposés sur les planches, Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux, Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches Comme des avirons traîner à côté d'eux. Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule ! Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid ! L'un agace son bec avec un brûle-gueule, L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait ! Le Poète est semblable au prince des nuées Qui hante la tempête et se rit de l'archer ; Exilé sur le sol au milieu des huées, Ses ailes de géant l'empêchent de marcher.