Ravage

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Work in progress...

Ravage est un roman dont j'ai eu entendu parlé pour la première fois au début des années 90 en lisant le science-fictionnaire de Stan Barets, mais c'est les commentaires d'un billet du blog de Korben qui m'ont donné envie de lire. Considéré comme un des classiques fondateurs de la science-fiction francophone, c'est un récit post-apocalyptique classique où une catastrophe (ici : la disparition de l'électricité) amène les humains à repenser leur civilisation. Cette catastrophe reste accesssoire (ne demander pas le pourquoi du comment) et le récit s'attache surtout à décrire ce qui se passe après.

L'histoire commence le 03 juin 2052, un futur imaginé par un homme du début du XXe siècle, et c'est toujours un problème pour un écrivain de SF d'essayer de décrire un temps qui peu être le futur proche voir même le quotidien technologique de ses lecteurs. On esquisse donc un petit sourire lorsque Barjavel imagine par exemple un système de télélecture dans les trains assuré par des opérateurs qui lisent le contenu des ouvrages aux voyageurs. Plus intéressante est sa vision d'une société où les artistes ont un statut fixe et reçoivent une rente, mais où ils sont amené en même temps à abandonner les recherches inutiles et à ne plus discuter les saines traditions académiques (p.25). On se demande ce que peut être une recherche inutile en art… Certaines oeuvres d'artistes ressemblent aux sculptures vivantes de Vonarburg.

On ne remarque aucune référence à la seconde guerre mondiale. La télévision en relief et en couleur diffuse l'image de quelques belles filles nues qui favorisent la pousse des adolescents, [...] les relations conjugales (p.30). L'habillage témoigne de ce qui se passe dans d'autres espèces animales : les hommes se parent de couleurs chatoyantes pour séduire les femmes. Toute la nourriture est fabriquée en usine et on voit certains personnages qui ne savent plus reconnaitre une poule, à rapprocher de la réaction de certains enfants d'aujourd'hui qui, quand on leur demande à quoi ressemble un poisson dessinent un bâton de poisson pané. L'élevage, cette horreur, avait également disparu (p.40) ; l'usage de blocs de viande fait écho à ce qu'on verra plus tard dans une série de SF comme Torchwood. Seul le sud de la France résiste encore à la mécanisation totale de la société et cultive encore la terre. Mais, après cette vision du future assez pertinente, on remarque bien que le roman a été écrit au début du XXe : il y a encore un enseignement féminin où les femmes apprennent à devenir de bonnes maîtresses de maison. Malgré le progrès et l'évolution technique, la morale reste très attardée (p.51).

La situation politique internationale est par ailleurs problématique : une guerre fait rage en Amérique où l'empereur du Brésil Robinson (un noir de race pure, avec des lèvres énormes, au nez plat - p.81) a bombardé les USA, sans doute en réponse aux années de colonialisme et d'esclavagisme - un conflit qui préfigure la période de décolonisation que l'Europe connaîtra dans les années 50-60.

C'est dans ce contexte que nous faisons la connaissance de François, ingénieur agronome qui monte à Paris pour recevoir ces résultats d'examens, et surtout pour revoir Blanche, son amour de jeunesse, qui débute une carrière prometteuse de danseuse à la télévision.

Et l'électricité disparaît.

Ne demander pas pourquoi ni comment, c'est comme ça. Les lumières s'éteignent, les métros s'arrêtent, les avions tombent, … Les réactions politiques témoignent des évolutions de la société française à l'époque de la rédaction du roman (fin des années 30) : les congés payés, la laïcité et les conflits avec l'église (p.117). Devant la régression technologique, on en revient aux baïonnettes.

Dans le chaos qui débute, François part secourir Blanche, prisonnière des hautes tours de la radio et, au terme de cette première partie, on devine déjà la violence et la barbarie qui va s'emparer de la société française dans la suite du roman (p.148). Le feu ravage Paris et François envisage de quitter la capitale, livrée aux bandes de pilleurs. Pour cela, il se constitue un groupe qui s'adonnera lui aussi au pillage et à la destruction afin d'amasser provisions, matériel et armement. Le choléra fait son apparition.

les images sont saisissantes, crûes et c'est la plus belle réussite du roman et de l'écriture de Barjavel : les crânes fendus, les plaies ouvertes, les couteaux enfoncés en pleine gorge restent longtemps en mémoire (p.193-197) ; les atrocités de la guerre de 14-18 sont encore dans les têtes...

Finir...