Le déchronologue
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Le déchronologue nous plonge dans l'atmosphère poisseuse des caraïbes du XVIIe siècle gorgé de Rhum (ou plutôt de tafia) du matin jusqu'au soir. Un zeste de civilisation maya en résistance, d'empire espagnol et d'exil des Huguenots, un soupçon d'uchronie et de paradoxes temporels, et nous voilà embarqué dans une guerre dont on ne comprend pas totalement les tenants et aboutissants, l'auteur se gardant bien de faire du lecteur un démiurge ; Nous restons constamment à hauteur d'hommes.
Des hommes auxquels on s'attache assez facilement, y compris ceux que l'on ne croise que quelques instants et même si les caractérisations restent superficielles : Féfé de Dieppe, Arcadio, Mendoza, gobe-la-mouche, Le Baptiste, Sévère et, bien-sur, le capitaine Villon, qu'on accompagne de bout en bout dans ses beuveries, ses combats et ses amours. Nous en savons rarement plus que ce dernier ; tout au plus devinons-nous les choses un peu avant lui car le récit n'est pas exempt de clichés ou de choses déjà vues.
On est un brin agacé par le style dans les premières pages du roman ; plus on avance dans la lecture, plus on s'y fait vu qu'il colle assez bien à l'ambiance du récit ; et on finit par apprécier les tournures et le vocabulaire, car cette forme participe grandement à l'instauration et au rendu du climat. La construction du roman pourra elle aussi dérouter : les chapitres sont rangés dans le désordre, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas une logique dans la succession des scènes ; le suspense et l'intérêt de la lecture restent présent jusqu'au bout. Le procédé est agréable au début, devient légèrement pesant au milieu pour retrouver tout son sens à la fin. On ne s'ennuie pas une seule minute et on dévore chapitre après chapitre, avec à la fois l'envie de savoir ce qui va se passer mais aussi l'appréhension de voir le récit se rapprocher de sa fin...
Une belle réussite qui donne envie de lire les autres romans de Beauverger.